À 29 ans, elle est la plus jeune femme jamais élue au Congrès américain.
Pour le Today’s Special du 10 janvier, direction les États-Unis, où un nouveau visage fascine depuis quelques mois. À 29 ans, Alexandria Ocasio-Cortez est en effet la plus jeune femme jamais élue au Congrès américain. Élue de New-York, elle a pris ses fonctions à la Chambre des représentants le jeudi 3 janvier, et incarne la relève de l’aile gauche du Parti démocrate. Complètement inconnue il y a plusieurs mois, on la voit désormais partout sur toutes les grandes chaînes américaines. Cette semaine, elle était invitée à commenter les dernières déclarations de Donald Trump, juste après une de ses interventions très importantes. On a interrogé Mathieu Magnaudeix, correspondant de Mediapart à New York, à son sujet.
Qui est Alexandria Ocasio-Cortez, star politique surgie de nulle part ?
Mathieu Magnaudeix : Elle est de New York et issue d’une famille originaire de Porto Rico, d’un milieu de classe moyenne. Elle est donc passée par toutes les galères, celles d’une famille qui a eu des déboires financiers. Elle a dû se mettre à travailler comme serveuse dans un bar à la mort de son père alors qu’elle faisait des études brillantes, qu’elle avait dû financer en s’endettant, comme beaucoup de jeunes Américains. Elle a cru à un moment devoir être serveuse toute sa vie. Puis elle a décidé d’être candidate dans le Bronx, dans un quartier très populaire de New York, pour la Chambre des Représentants – l’équivalent de notre Assemblée Nationale.
Elle a battu, en juin, un baron du parti démocrate, l’un des plus en vue dans son camp. Sa popularité a été complètement fulgurante, aussi liée à sa communication très abondante sur les réseaux sociaux. Elle y documente, presque en direct, tous les aspects de sa campagne et de son arrivée au Congrès qu’elle a raconté en détails à son million de followers sur Instagram via des stories. Elle continue à chroniquer sa vie d’élue, ce qui lui crée une audience et une célébrité accrue.
Elle plaide pour des choses qui, il y a encore quelques années, avant la campagne de Bernie Sanders, passaient pour des utopies absolues
Alexandria Ocasio-Cortez est de gauche, une gauche bien à gauche dans un pays où le mot « socialisme » est souvent synonyme d’enfer. Ses adversaires la jugent radicale, que défend-elle ? Quelles sont ses positions ?
Mathieu Magnaudeix : Ce qui est intéressant, et nouveau, c’est qu’elle-même revendique – ce qui est quasiment une insulte aux États-Unis – le mot « radical ». Elle l’assume, et surtout elle plaide pour des choses qui, il y a encore quelques années, avant la campagne de Bernie Sanders, passaient pour des utopies absolues : la sécurité sociale universelle payée par l’État, l’abolition de la police de l’immigration qui terrorise les sans-papiers (notamment dans les quartiers du Bronx et du Queens où elle est élue), le droit au logement, dans un pays où il y a une énorme gentrification, où les loyers ne cessent d’augmenter et où les pauvres sont sans cesse poussés dehors. Elle plaide pour le maintien des classes populaires dans une ville comme New York. Il y a aussi parmi ses revendications le salaire minimum à 15$, qui était une mesure proposée par Bernie Sanders en 2016, ou l’interdiction des prisons privées. Il y a aux États-Unis une grande industrie carcérale, où des boîtes privées cotées en Bourse gèrent des centres de détention. Elle propose l’abolition de cela, ce qui était encore complètement impensable il y a quelques temps. La campagne de Sanders a changé les choses.
Bernie Sanders qui, au passage, envisage de se présenter à nouveau à la Présidentielle malgré ses 77 ans. En voyant ce profil on pourrait penser qu’elle ferait une candidate sérieuse face à Donald Trump dans deux ans. Mais il y a un petit problème, non ?
Mathieu Magnaudeix : Le seul problème c’est qu’elle est trop jeune. Elle a 29 ans et il faut avoir 35 ans pour être candidat à la présidentielle aux États-Unis. Il va donc falloir que le Parti démocrate trouve non seulement un.e autre candidat.e mais définisse aussi sa ligne politique face à Donald Trump, centriste ou très à gauche. Ce sera la question des prochains mois.
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