Un sampler exclusif et une interview du fondateur du label : 96
Cosmonostro est une pépinière de talent, un label au sens noble du terme, à des années lumières de l’image véhiculée aujourd’hui par une grande partie de ces institutions musicales. Cosmonostro est le rêve d’un homme, dévoué tout entier à la musique, et doté, il faut le reconnaître, d’un flair incroyable.
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A cet entretien est couplé un sampler exclusif des morceaux à sortir chez Cosmonostro! Retrouvez une playlist de 16 morceaux par ici!
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En une simple petite année d’existence, Cosmonostro a développé une identité sonore mais aussi visuelle qui lui est propre, et fait grandir dans son sillon des artistes aujourd’hui sur le devant de la scène. Stwo, Phazz, Everydayz…. Toute la nouvelle scène de bass music française est passée par ce label. Mais le label est aussi international, fort d’une expérience à l’étranger avec la fondation du label Soulection à Los Angeles, dont 96 était un des fondateurs, pour le hisser rapidement comme une des références de cette bass music émergente. Cosmonostro n’est pas un coup d’essai mais le voyage musical d’un mélomane engagé et sûr des directions et des mises en valeurs qu’il souhaite offrir aux artistes qu’il découvre et chérit.
Cette vision musicale méritait que l’on rencontre son chef d’orchestre, mais nous sommes allés plus loin avec la confection d’un sampler de tous le catalogue du label pour les mois à venir en exclusivité pour vous, nos chers novanautes. Et vous pouvez le retrouver ici.
Qu’est ce qui t’a poussé à l’origine à fonder le label Cosmonostro ?
96 : Etant graphiste à mes heures perdues depuis un petit moment, l’idée initiale était de me renouveler en dehors de la direction artistique de Soulection dans laquelle je m’étais enfermé en centralisant mes artworks et la musique accouplée en un même lieu – une sorte de portfolio augmenté. C’est avec ma désolidarisation précipitée de Soulection que j’ai pu rapprocher Cosmonostro du modèle classique d’un netlabel. Le résultat est la direction artistique actuelle où j’ai réinventé ma façon de travailler graphiquement parlant jusqu’à ma manière d’aborder le rôle de producteur exécutif.
Cosmonostro se veut le contre-pied de Soulection en étant obscur au sens confidentiel, mal défini et en plaçant la dimension visuelle au même rang que la dimension musicale.
Le label Soulection a déclaré récemment qu’il y avait un réel essor du beatmaking et beaucoup de talents dans une nouvelle génération de musicien électroniques, toi qui vit la chose de l’intérieur, le perçois-tu de la même façon ?
96 : A mon sens, c’est erroné ou partiellement vrai parce que le beatmaking – et ça n’engage que moi – est une affaire analogique, physique & d’ascendance Hip-Hop – l’image d’Epinal sans doute fantasmée du crate-digger, de ses vinyles plus ou moins rares, des machines & instruments. Même si les 2 écoles : analogique & digitale, cohabitent depuis un moment – l’une prend clairement le pas sur l’autre. Je fais un distinguo entre beatmaker, producteur & compositeur parce qu’il est pas sûr qu’on parle tous de la meme chose en fait ; Grosses touches ou petites cases? Les limites sont ténues lorsqu’il s’agit de définir la scène beat puisque par essence ouverte à toute sources, influences ou outils.
Je ne raisonne jamais en terme de succès potentiel…
Quelques années en arrière, la bulle qu’était la niche Beat, qui n’intéressait globalement que ses acteurs et quelques connaisseurs, a explosé et s’est mutée en autre chose, faussement appelée future (comprendre fourre-tout) mélangeant hip-hop & EDM ; La démocratisation des solutions de MAO a saigné le beatmaking qui ne s’est plus suffit à lui-même et s’est marginalisé au profit de l’ouverture au mainstream.
In fine, il y a bien plus de candidats à l’appel mais je ne crois pas qu’il y ait plus de talents aujourd’hui. Par contre, il est plus facile de produire quelque chose de soigné – ce qui ne veut pas dire intéressant ou faisant preuve de talent.
Penses tu qu’il y ait une vraie identité sonore française ?
96 : Je pense que chaque région du monde a son identité, schématiquement : experimentation pour les USA, innovation pour l’UK, tradition pour l’Asie et l’Europe synthétise. Les français délivrent avec retenue pour être politiquement correct leur production avec ce coté étudié. USA & UK se posent moins de questions je trouve.
Comment fais-tu pour donner une vraie identité au label une vraie couleur musicale ?
96 : Conséquence heureuse je suppose… Mon cahier des charges est simple puisque je me borne à un “j’aime-j’aime pas” – je ne raisonne jamais en terme de succès potentiel… du moins, et ce depuis Soulection, je sais me faire confiance donc si j’aime, j’me dis que le reste devrait rouler.
Est ce que s’astreindre à un genre, à un registre n’est pas un écueil ?
96 : Je fuis ça. Mon style, c’est de ne pas en avoir. Notre fanbase est sans doute fragmentée par des sorties qui ne se ressemblent pas toutes mais je l’espère plus riche que la fanbase lambda. Si je peux éviter la facilité & l’ennui dans le même temps, je préfère.
Ma conception de la musique est moins une histoire de rythme ou de mélodie que de texture ou de narration du coup j’espère pouvoir amener l’audience vers autre chose que ce vers quoi elle tend à écouter naturellement.
Quitte à s’astreindre à quelque chose, ce serait de maintenir un équilibre entre une musique abordable, spontanée et une autre plus introspective, recherchée.
Comment est ce que tu qualifierais la musique et le registre qui est proposé par Cosmonostro.
96 : Jazz, du moins je me plais à le croire. Pas au sens strict bien sûr, quoique mais dans une idée d’héritage, de liberté. J’aime que la musique varie, surprenne ou se change, pas que ce soit meilleur mais traité différemment. Si la musique ne vit pas, ca m’intéresse pas. J’apprécie aussi un coté pété, bidouillé ou amateur. Apres les questions de genre et sous-genre, c’est une science que je ne maitriserai probablement jamais…
L’objectif est de faire vivre le label, pas ma petite personne
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A cet entretien est couplé un sampler exclusif des morceaux à sortir chez Cosmonostro! Retrouvez une playlist de 16 morceaux par ici!
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Quel est l’état d’esprit du label ?
96 : Mes interactions ont été majoritairement avec des américains ces dernières années et je pense que ca a déteint sur ma façon de faire c’est-à-dire être dans l’immédiateté, prendre des risques & faire son truc comme on l’entend.
Beaucoup cherchent les coups sûrs, bien maitrisés vus et revus au lieu d’être intuitif. J’aime chiner des artistes sur SoundCloud, des mecs sans crédibilité auprès de l’audience, sans experiences de labels et qui proposent quelque chose qui – sans être forcement révolutionnaire – soit different d’une façon ou d’une autre – Se mettre en danger d’une certaine façon.
On a pu croiser sur ton label des talents aujourd’hui en train d’exploser à l’instar de Stwo évidemment, mais aussi de Myth Syzer et Phazz entre autres, quel regard portes tu sur cette ascension?
96 : L’ascension flatte l’égo, ça donne un élan et des opportunités. Il faut s’en féliciter sans s’y attarder. Ils ont l’intelligence de délivrer quelque chose qui soit personnel à la fois construit et abordable pour l’audience alors la popularité est au rendez-vous. Je leur souhaite de faire durer leur momentum le plus longtemps possible. Je suis heureux et fier d’avoir pu participer à leur ascension et de pouvoir continuer à collaborer avec eux.
Fonder un label n’est pas forcément un choix évident aux regards des bouleversements que connaît la musique, comment espères tu en vivre ? D’après quelles stratégies ?
96 : L’objectif est de faire vivre le label, pas ma petite personne – même si j’ai rien contre. L’immense majorité autour de moi ne vit pas de la musique ni espère/aspire à en vivre, artiste ou label, ca n’intéresse plus vraiment les gens – du moins pas dans les rangs des jeunes générations. Le moteur reste la passion de chacun.
Je dirais que la réelle stratégie est de rester minimal sur la partie promo assez vaine telle qu’elle est entreprise si souvent par les netlabels pour se diriger vers d’autres perspectives. De nos jours, le focus est fait à tord systématiquement sur ce qui est immédiatement visible quand les atouts réels ne le sont généralement pas. Je dirais pour illustrer qu’un label survit avec ses ventes mais est à même d’être prospère à terme avec le B2B.
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Comment vois tu Cosmonostro à long terme ?
96 : Ce que je voyais comme le long-terme au départ s’est produit en juste quelques mois. Il s’est passé pour Cosmo en 6 mois ce qu’il s’était produit en 2 ans avec Soulection. Du coup, je ne fais de plan ni sur la comète ni de conquête du monde – ça m’intéresse assez peu à vrai dire. Je mène le truc sans prétention aucune – qui vivra verra.
Depuis le début je cours après le label pour essayer de rattraper le retard face à sa croissance. Pour notre premier anniversaire, l’échiquier sera enfin en place. Le moyen-terme est d’arriver à quelque chose de pérenne, un projet finançant le suivant.
Sur quel autre label portes-tu ton attention ? Que tu sens proche de l’Etat d’esprit de Cosmonostro?
96 : Je regarde à la fois ce que les labels établis font pour donner une idée de trajectoire mais aussi les nouveaux-nés, viviers de talent à découvrir & d’idées à piocher comme ces labels dédiés aux moins de 18 ans.
J’ai comme références des institutions Stones Throw, Jazzy Sport & Ghostly.
J’aime beaucoup de respect pour des labels comme Error Broadcast, Leaving Records ou encore Vlek. Question état d’esprit : Cascade Records & Feelin’ Music, il y a l’amour du passionné, du gros boulot et de la fraternité.
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A cet entretien est couplé un sampler exclusif des morceaux à sortir chez Cosmonostro! Retrouvez une playlist de 16 morceaux par ici!
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