Deux Nick Cave dans une cave du 9-3 ? Les Cramps de Romainville ? Merci d’applaudir cette freak parade de rockeurs galeux qui, à l’heure de leur premier véritable album, nous offre une ballade post-apocalyptique inédite.
« Rappelle-toi. Il ne restait rien. De la poussière et des cendres. » Où sommes-nous ? Peut-être dans la cave d’un club parisien, quelques heures après le concert que donnera Rest In Gale à la sortie du confinement, pour célébrer Tombola, leur véritable premier album, à paraître fin janvier sur le label Kliss / Jarane. On peut s’en convaincre en regardant le clip de Bateau ivre, dans lequel les deux fondateurs du groupe, Julien Howler et William Rains, aux voix d’outre-tombe proches du lyrisme lugubre de Nick Cave, nous content une histoire de tatouage carcéral (vu le titre, on aurait pu parier sur des « Peaux-Rouges criards qui les auraient pris pour cibles et cloués nus aux poteaux » : ça marche aussi), en variant leurs effets, grandiloquents et inquiétants, impeccables. Tout Tombola est de ce tonneau (de whisky). Une fête foraine avec fichtre fantômes (Clash, Cramps), mélancolique ou furieuse, bombée de pub-rock ou parfois chantée en arabe (comme sur Amari, second single, mis en ligne le 18 novembre), avec un talent épais pour les lignes mélodiques.
Formé en 2014, ce duo de Romainville (Seine-Saint-Denis) devenu quintet doit son nom à la gale authentique que Julien et Will attrapèrent au cours d’une « tournée UK un peu casse-gueule ». La maladie semble avoir proliféré dans le futur post-apocalyptique de cette chanson spécialement écrite et composée pour L’Arche de Nova. La démographie s’est tarie. « Nous ne ferons plus naître de la chair à être dirigée. Des nations entières ont disparu. » Mais les survivants étaient en fait « cachés sous les eaux froides » et, « quatre-vingt-deux étés plus tard », s’exclame l’arrière-petit-fils du Johnny S.-F. de Poème sur la 7e (1970) qui ressuscite soudain derrière le micro pour… peindre en hurlant des hommes « en costumes cravatés » qui se sont « entretués », sur une plage, et dont les corps sont découverts par des amoureux séditieux. Entêtant court-métrage musical.
Pour voir la vidéo de Bateau ivre, c’est ici : https://www.youtube.com/watch?v=4Bmv9pUnsjM&ab_channel=R.I.G
Image : Fan-art de La Planète des Singes, de Franklin Schaffner (1968).