Pour célébrer la créativité et la subversion « de rigueur » en Mai 68, l’association Monoquini et ses cinéphiles fous se sont lancé dans une vaste rétrospective baptisée Désordre, histoire de donner une seconde vie à quelques pépites sur pellicules injustement oubliées. La plupart de ses projections ont été ou seront données dans les salles complices de l’Utopia à l’exception de l’opération Revlux : Cinéma éphémère, du mercredi 23 mai au dimanche 27, un aparté qui constitue une commémoration à double titre.
Celle du vent de folie de Mai 68, bien-sûr mais aussi de celui qui régnait à Bordeaux au début des années 2000…
Souvenez-vous, à la fin du siècle dernier, l’industrieuse rue Bouquière était le royaume des grossistes en tissus, une activité si florissante qu’elle finit par être victime de son succès, la congestion due aux norias de camions de livraison étant quasi permanente. Avant de mourir d’asphyxie, lesdits grossistes décidèrent alors d’un commun accord de partir s’installer sur la zone industrielle de Bordeaux Nord, laissant d’un coup d’innombrables pas de portes vacants à des prix défiant toute concurrence. Et c’est alors qu’arrivèrent de nombreuses associations, collectifs de créateurs, artistes en mal d’ateliers, éditeurs indépendants, maquis africains ou compagnies de théâtre… Ah, c’était le bon temps, les parisiens ne savaient pas encore placer Bordeaux sur la carte, les loyers étaient doux et une joyeuse et exubérante folie douce s’empara alors de la rue… On pouvait y passer des jours entiers d’ateliers en expos, mais aussi des nuits très blanches dans quelques fameux clandés.
Et c’est en 2001 que la Compagnie « La Nuit Venue » débarqua au numéro 17 pour s’installer dans les anciens locaux de Revlux dont elle se garda bien de changer le nom. Pour marquer le coup, elle convia l’artiste et fleuriste Olivier Caban ainsi que les ancêtres de Monoquini (Les Chercheurs d’Ombres) à collaborer ensemble lors du « Printemps Précoce » de « Revlux en Fleurs« , joyeux mélange d’installation végétale et de projections décoiffantes.
Ce fut un succès fou.
Hélas, la roue tourne et les rapaces promoteurs immobiliers aussi, s’abattant comme des vautours sur le moindre bail qui se libère à coups d’offres alléchantes que les propriétaires ne peuvent refuser… Les artistes n’ont pas les reins pour résister à la pression immobilière et petit à petit la rue se vide de tous ces zazous magnifiques qui avaient su lui donner une âme.
Revlux, c’est fini, la Compagnie « La Nuit Venue » repartira bientôt sur les routes et avant de grimper à nouveau dans les roulottes, ils s’offrent, 17 ans après, ce dernier baroud d’honneur sous forme de cinq jours de cinéma éphémère et révolutionnaire.
Chaque soir dès 19h, Monoquini y propose l’Apéroptic, un réjouissant mélange à base de boissons fraîches et de courts métrages bouillants suivi à 20h30 d’un film bien saignant en guise de plat de résistance.
Quelques noms ? Taking Off de Milos Forman, Petulia de Richard Lester, Jeu de Massacre d’Alain Jessua, Belle de Nuit de Marie Eve de Grave, Les Mauvaises Fréquentations de Jean Eustache, Le Pouvoir dans la Rue d’Alain Tanner, pour n’en citer que quelques uns parmi ce florilège de contestation toujours d’actualité et de provocation salutaire hautement recommandée à tous ceux qui voudraient éviter de voir leur cerveau se transformer en betterave molle.
Toi qui a encore l’esprit libre, n’hésite pas à jeter un oeil ICI pour découvrir l’intégrale de la programmation ainsi que les surprises de dernière minute…
Tarifs : 5 € la séance Pass : 20€Prix libre (mais pas radin) : chômeurs, demandeurs d’emploi, bénéficiaires du RSA, travailleurs précaires…
Gratuit pour les enfants de moins de 16 ans. Buvette et petite restauration à prix modique.