Portraits d’artistes et d’anonymes qui se sont battus pour l’émancipation sociale et culturelle.
L’histoire de la musique, de la danse, de l’art, de la mode, a été renouvelée par des personnalités, anonymes ou reconnues, qui ont voulu se libérer des contraintes. Que ces obstacles soient politiques, sociaux ou culturels, il fallait assumer pour prendre la parole et aider des générations entières à s’émanciper. Aujourd’hui, avec Ray Ban et la #Campaign4Change, nous partons à la découverte de ces parcours originaux et engagés.
LE VOGUING
Dans les années 1980 être Américain, noir et homosexuel n’est pas chose aisée. Pourtant une communauté de danseurs rassemblés par leur goût de la mode et de la fête, va réussir à émerger et à s’affirmer au-delà des obstacles. Les vogueurs, c’est leur nom, vont devenir les princes de la nuit à travers les grandes villes des Etats-Unis.
Leur danse à eux s’appelle le voguing et consiste en une série de pas empruntés aux podiums et aux magazines de mode. On prend la pose, on se maquille, on s’habille pour mieux s’assumer. Car c’est uniquement au sein des House et pendant les ball – ces soirées en club où les danseurs s’affrontent – que les vogueurs se sentent vraiment libres de s’affirmer.
Ils libèrent leurs corps, transcendent les normes esthétiques et bousculent les identités sexuelles et culturelles. Quand la nuit vient, ils ont le droit de s’exprimer sans contrainte. On s’en souvient, en 1990, Madonna sort le titre “Vogue” qui leur rend hommage et leur permet d’être reconnus par un plus large public.
Depuis, les mentalités ont évolué et leur danse aussi. Mais les vogueurs continuent de régner en maîtres dans le monde de la nuit, et se sont exportés jusqu’à Paris.
Surtout, ils continuent d’incarner un esprit de liberté, d’émancipation et d’acceptation de soi.
SOCRATES, LE JOUEUR DE LA DEMOCRATIE
De Socrate à Socrates, il n’y a qu’une lettre et qu’un pas. Si l’un a posé les fondements de la philosophie et de la politique moderne, l’autre est un joueur de foot dont les idées progressistes ont changé la face du Brésil.
Nous sommes en 1983 – en pleine Coupe du Brésil – et l’équipe des Corinthians entre sur le terrain avec une banderole sur laquelle on peut lire “Gagner ou Perdre mais toujours en démocratie”. Rappelons-le, à l’époque, le pays de Maracana est sous le joug d’une dictature militaire qui dure depuis le milieu des années 1960.
Et si à l’époque de nombreuses voix s’élèvent contre ce régime politique, celle de Socrates aura un écho tout particulier dans la patrie du foot. Car en plus d’être un excellent milieu de terrain, Socrates a été un grand républicain, dont l’expérience de “démocratie corinthianne” a marqué définitivement l’histoire du sport et de la politique brésilienne.
Au début des années 1980, le footballeur initie en effet une expérience inédite d’autogestion dans le club de foot de Sao Paolo. Car en plus d’être docteur en médecine, Socrates est passionné de sociologie et décide donc d’appliquer ses principes égalitaires et ses revendications de justice au sein de son équipe de foot. Dans son club, l’argent est redistribué à égalité entre les joueurs et les dirigeants sont choisis par les coéquipiers. Et c’est en gestion collective que l’équipe va vite devenir une des meilleures du pays.
Si cette initiative est encore considérée comme une des plus audacieuses dans le domaine du sport, elle a surtout marqué la lutte contre la dictature et la corruption au Brésil, prouvant que c’est ensemble que l’on avance, en affirmant haut et fort ce en quoi l’on croit.
LE PLUS VIEUX CREW DU MONDE
Dans le milieu du hip hop néo-zélandais, il existe un groupe de danseurs, un crew, qui se distingue assurément de tous les autres. Son nom ? The Hip-Operation. Sa particularité ? Ses danseurs ont entre 70 et 96 ans.
Depuis quelques années, ce collectif de 37 breakers du 3ème âge fait trembler la petite île de Waiheke, qui a vu naître leurs premiers spectacles de popping, de locking ou de break pour les plus courageux. Et quand on leur demande comment ils en sont venus à citer Michael Jackson ou Missy Eliott comme références et à enchaîner les figures et les chorégraphies, le crew le plus âgé du monde raconte qu’il tenait d’abord à prouver que la vieillesse n’est pas une fatalité.
Mais avec le temps et le succès, ils ont aussi compris que le rap et la danse étaient d’excellents moyens de resserrer les liens avec la jeunesse du monde entier. D’autant plus qu’ils admettent avec humour que les basses du hip hop en font la musique la plus audible quand on perd un peu l’ouïe.
Aujourd’hui, le Hip-Operation Crew participe aux championnats du monde de danse, donne des conférences dansées ou tourne dans des clips. Et partout on célèbre leur énergie et leur goût pour l’aventure.
Et tous ensemble, ils sont la preuve vivante que la vieillesse ne condamne pas à l’immobilité et à l’inactivité, et qu’il n’y a pas d’âge pour commencer à être heureux !
Alors roulez jeunesse.
FRIDA KAHLO, L’ARTISTE LIBRE ET INDEPENDANTE
Quand on pense à Frida Kahlo, on pense à ses auto-portraits colorés, aux couronnes de fleurs qui ornent ses cheveux, à ses sourcils broussailleux et à sa liberté de ton. Car encore aujourd’hui, elle continue d’incarner l’artiste rebelle – libérée des contraintes qui pèsent sur les femmes dans les années 1920 – et indépendante, tant dans ses oeuvres que dans ses relations.
En 1925 Frida Kahlo est gravement blessée dans un accident de bus. Pour autant, elle n’abandonne pas et alors qu’elle passe de longs mois alitée, elle décide de se représenter, à travers ses tableaux, malade et en position de faiblesse. L’artiste mexicaine n’hésite pas à désacraliser l’auto-portrait s’il permet de mieux s’accepter, même diminuée.
Et c’est toute l’intégralité de son oeuvre, de ses tableaux, de ses fresques, de ses lettres qui seront marqués par ce rapport à soi frontal mais toujours honnête.
Frida Kahlo est une femme libre et engagée, mais elle se sait également fragile et sa relation tumultueuse avec le peintre Diego Rivera incarnera ces dualités que l’artiste veut accepter à chaque instant.
Elle le dit elle-même à l’époque : « Je serai donc l’amie de ceux qui m’aiment telle que je suis ». Et aujourd’hui, si l’on continue de célébrer l’art de Frida Kahlo, c’est justement parce qu’il est honnête et résolument franc.
LE RENOUVEAU DE LA MODE
Depuis quelques années, la mode commence à se poser quelques questions : et si les magazines n’étaient pas à l’image de leurs lecteurs ? et si les top modèles ne représentaient pas le reste de la population ? et si on révisait nos canons de beauté pour mieux donner à voir les diversités culturelles, physiques et ethniques ?
C’est en tout cas le combat que mènent certaines personnes aujourd’hui, qui en appellent à une figuration plus exacte des corps et des femmes, notamment.
Parmi ces voix qui s’élèvent, Stefania Ferrario est un modèle que certains désignent comme un mannequin grande taille, “un plus size model” en anglais . Sauf que cette appellation, qui ferait d’elle un modèle hors norme, elle la refuse.
Elle est un mannequin, un point c’est tout. Et pour affirmer haut et fort son désaccord, la jeune femme de 21 ans a lançé sur les réseaux sociaux la campagne « #droptheplus », c’est-à-dire « #lâcherleplus » maintes fois reprise depuis.
En demandant à ce que les stylistes, les magazines et les professionnels de la mode intègrent d’autres standards de beauté à leurs catalogues, elle appelle surtout une génération de femmes à s’assumer telles qu’elles sont. C’est-à-dire avec ou sans formes, avec des cheveux bouclés, crépus, des afros, des yeux noirs, des petits pieds ou des grandes mains.
Loin d’être futile, ce combat pour une représentation plus juste des beautés est le signe que notre génération rêve d’émancipation personnelle et collective et entend se battre pour l’obtenir.