À Nova, le reggae, ça nous connaît. Pas pour rien si on lui a dédié une webradio spéciale, la Nova Reggae, ouverte ici-même à toute heure du jour et de la nuit pour qui veut embarquer « dans le train des mille et un riddims » ; reggae, rocksteady, dancehall, ronds de cire 60-70s, nouveautés bien senties, tout est affrété en première classe pour l’agrément de vos tympans.
Le topo sera similaire, début août, du côté de Vertheuil, au coeur des vignes du Médoc. Certes, depuis quelques années, la raison sociale du SunSka Festival s’est délesté de ce mot, « reggae », qui chapeautait auparavant ses destinées. Par volonté de se conformer à l’usage, et d’ôter quelques loquets sur les barrières délimitant son pré carré stylistique. Il n’empêche, le « ska » demeure, éclatant, pour rattraper le reggae et la Jamaïque par la rastacap.
Car, au fil de ses vingt-cinq années d’existence (et de ses localisations diverses), le SunSka a toujours pu compter sur un contingent jamaïcain de haut vol, de Ken Boothe à l’effarant producteur dub Lee Scratch Perry, de Jimmy « The Harder They Come« Cliff aux Wailers, du timbre métallique et habité d’Horace Andy à Toots & the Maytals. Une base quintessentielle à laquelle on peut ajouter quelques noms supplémentaires : les Specials, Hollie Cook, Calypso Rose, Chinese Man ou la chanteuse carioca Flavia Coelho, tous et toutes passé.es par le raout girondin.
À la programmation, cette année, le SunSka Festival s’est offert quelques flamboyantes têtes de gondole dignes de l’inventaire précédemment évoqué. Parmi ces headliners qui nous font de l’oeil, évoquons sans plus de circonlocutions les acrobaties, volutes et autres virevoltes dessinées par L’Entourloop, amicale société reggae-rap présidée par Sir Johnny et King James, à qui nous confiions une carte blanche sur notre antenne il y a quelques mois de ça. Pensez bien à rester dans la boucle.
La boucle, justement, l’inusable Max Roméo s’apprête à la boucler, en beauté. Car, oui, son concert en terres girondins sera l’un de ses derniers. L’immense chasse-diable, contempteur de toutes les Babylones depuis bientôt six décennies, l’a d’ores et déjà annoncé : il entreprend là son ultime tournée. cette vingt-sixième édition du SunSka offrira donc l’opportunité d’entendre quelques-uns de ses derniers morceaux live, ses dernières salutations avant l’extinction des amplis et la clôture des bans pour le natif de Saint-James ; la conclusion d’une carrière formidable que les festivalier.es sauront – on n’en doute pas une seule seconde – saluer comme il se doit.
Pour rester dans le registre des vieux briscards, le SunSka pourra également s’enorgueillir de la venue du prestigieux collectif Inna de Yard, brelas d’as du reggae roots (les septuagénaires Kiddus I, Winston McAnuff et l’ex-Congos Cedric Myton), réglant la Family Affair de leur dernier album comme ils le firent, il y a peu, en ultimes invités de la « Chambre Noire » (une émission à réécouter ici).
Béni.e soit qui au Mali pense, ensuite, grâce à cette autre fameuse personnalité qui enflammera la scène One Love à un jet de mégot de la D1215 (un Canadair virtuel vous sera offert avec cette métaphore) : Fatoumata Diawara. Croisée au cinéma (de La Genèse de Cheick Oumar Sissoko au multicésarisé Timbuktu) comme aux côtés de Mulatu Astatke, Bobby Womack et, last but not least, de Damon Albarn (chez Gorillaz, pour ses morceaux persos ou encore pour l’opéra anticolonial Le Vol de Boli), la musicienne malienne a surtout paraphé ce printemps un remarquable album, baptisé London KO.
Un véritable « disque monde dont Bamako serait le centre névralgique », dixit notre bureau d’analyses, allumant d’électriques connexions vers Londres, La Havane, Kingston, vers les fiefs où prospèrent la synthpop, le jazz cubain et le dub. Avec ses bagues serpentiformes et son lance-pierre fétiche dans la poche, inséparable relique de son enfance tourmentée (excision, violence familale, mariage forcé, exil, etc.), comptez sur elle pour viser juste et fort, au fil de ses chansons altières, critiques, engagées, faramineuses.
Enfin, lâchons un dernier mot à ce propos de « Soundbwoy Ting ! », ce soundsystem à trois têtes qui mettra un jaguar dans la sono. Ça va rugir dans tous les confins car au micro, c’est le toujours aussi suprême Joey Starr qui donnera de la voix, de son flow à l’inénarrable raucité. L’ex-NTM qui sera accompagné, aux platines, par deux spécialistes de la chose reggae-dancehall, en l’occurrence Tuco Gadamn, élevé à la blédine hip-hop et Marley depuis tout petit, ainsi qu’un fidèle de la radio, Judah Roger, ce très cher et très polyvalent Judah Roger à qui toutes les gapettes (DJ, journaliste, impresario …) vont à merveille.
Autant d’impétrant.es, d’intervenant.es, d’arguments qui nous font dire que ce SunSka-là sera tout un weekend durant un spot où les lettres THC auront, une fois de plus, un autre sens, celui de Territoire Hautement Cool.
SunSka Festival #26, du vendredi 4 au dimanche 6 août @ Domaine de Nodris (Vertheuil).