Ray Davies, grand auteur, mauvais caractère ?
Avec la sortie de la biographie et discographie des KINKS (pervers ?), Didier Delinotte et Jacques Vincent posent avec précision une pierre angulaire de la Pop anglaise magique des sixties.
Têtes d’affiches : si l’on oublie un peu les Beatles et Stones, si on met de côté les stricts BLUES (John Mayall, The Animals, Yardbirds..) et que l’on veut du pur British, du jamais vu, de l’excentricité MODS, alors il ne reste que les Who, les Small Faces, les Kinks, en tête…
Il faut toujours réviser les clichés, les hits, les fortunes diverses des groupes ROCK, même mythiques, pour comprendre quelque chose et observer les talents à l’œuvre, débarrassés des modes et des scandales.
Emmenés par l’incroyable RAY DAVIES (et son frère DAVE), les KINKS ont vraiment monté et descendu toute la gamme des RAGES, des cris, des trouvailles, des ATTITUDES, des contradictions, des MODES et même des SONS de cette période où l’Angleterre recréait le monde.
De leur premier coup d’envoi, le célébrissime « You really got me » – sur les amours énervés des jeunes MODS sous amphés – , jusqu’au désabusé « Think Visual » – comme une parodie de slogan pour clips des années 80 – Ray Davies a écrit sur TOUS les aspects de cette flambée. Les filles, les Mods, les Dandies (« I’m not like everybody else »), les Fashion Victims (« Dedicated Follower of Fashion »), les Bourgeois paumés (« Sunny Afternoon »), les quartiers de Londres (« Waterloo Sunset »), la Nostalgie (« See my Friends »), l’Adolescence, les Pop Stars factices, la vie sociale anglaise (« Muswell Hillbillies »), les dépressions, les phobies, l’écologie (« The Village Green »)… Plus des opéras, des films, pièces de théâtre, essais, poésies, spectacles, Cirque, music hall…Le kaléidoscope complet des étincelantes années soixante, ou Londres réinventait la culture, se trouve dans l’œuvres des Kinks : Mods , Rock, Garage et PUNK mêlés, avec un doigt de dandysme hooligan.
Plus rare encore, en bons britons d’origine prolo (6 sœurs précèdent les 2 frères dans la famille Davies de Muswell road au Nord de Londres !), ils n’ont jamais cédé à la vague californienne hippy, et aussi refusé l’embourgeoisement et ont ainsi gardé leurs fans À VIE ! (j’en suis).
Que voulez-vous, quand on aime les chemises Ben Sherman et les polos Fred Perry, les Sta-Prest et les boots, on passe difficilement à la Kurta indienne et au poncho…
Pour couronner cette saga kinkienne, les 2 autres membres : Pete Quaife (basse et chant) et Mike Avory (batterie) ont su tenir le coup au milieu des bagarres, beuveries et autres dérives violentes du groupe, avant que les crises d’ego habituelles n’enchainent les SPLITS et autres remplacements imposés par les leaders.
RAY DAVIES (qui avait fait une école d’Art : Hornsey) était à mon avis un insatisfait, un hyper actif, un exigeant, cynique et romantique à la fois, un pur produit de ce que générait la culture anglaise d’après-guerre (héroïsme pendant la guerre = fierté + respect des vieux, + liberté totale ensuite, traditions populaires ET musicales ouvertes et joyeuses…) Ce qui explique en partie l’incroyable productivité de cet exceptionnel SONG WRITER que fut Ray, ne craignant aucun sujet ni contradiction, étant le parfait étalon MOD-Carnaby-Swinging London.
Enfin pour compléter ce portrait, sachez qu’en plus, les Kinks ont été parmi les rares à ajouter à leurs guitares cristallines et à leurs chansons aigre-douces, des RIFFS puissants, appelés POWER CHORDS, avec des coups le lames de rasoirs sur amplis et guitares afin de rendre les sons encore plus rauques et déchirants. Le futur Hard rock.
Merci de votre attention.
THE KINKS. Histoire d’une nostalgie chronique, par Didier Delinotte et Jacques Vincent. Éditions Camion Blanc. 300 pages. 34 Euros
Avec discographie complète et images des simples (45t) en N&B