Vous voulez changer de citoyenneté comme gégé ? Petit choix de nationalités aux 4 coins du monde.
En ces temps incertains de dénationalisation massive des icônes françaises, de Gérard Depardieu le Russe à Richard Bohringer le Sénégalais, la question du changement de nationalité se fait plus insistante que jamais. Comment change-t-on de nationalité ? Comment acquiert-on la nationalité chinoise, ougandaise nauruanne ou argentine par exemple ? Tour d’horizon non exhaustif des hôtes autorités nationales.
La Belgique, 47.001ème dossier
Comme le relève le magazine Slate, la nationalité belge s’acquiert de 4 manières différentes.
1) L’option simple : La mal-nommée “option simple” veut que vous puissiez déposer une candidature à l’acquisition de la nationalité belge si vous êtes né en Belgique ou hors de Belgique d’un parent belge, ou si vous avez vécu pendant un an en Belgique avant vos 6 ans chez une personne qui exerçait sur vous l’autorité parentale. Si c’est votre cas, vous devrez également satisfaire à, au moins, une des conditions suivantes : avoir entre 18 et 22 ans et résider en Belgique depuis douze mois, ou y avoir résidé entre l’âge de 14 ans et l’âge de 18 ans ou pendant neuf ans.
2) Le mariage (hétéro et homo) : se marier est sans doute le meilleur moyen de devenir belge. Encore faut-il résider depuis six mois (au moins) avec son conjoint en Belgique et être « autorisé ou admis, depuis au moins trois ans, à séjourner plus de trois mois ou à s’établir dans le Royaume ». Dans le cas contraire, il faudra résider dans le pays pendant trois ans. Sinon, plus simple, résider à l’étranger avec son conjoint, et arguer auprès des autorités de ses « attaches véritables avec la Belgique » – quand bien même vous n’en auriez aucune, le flou juridique qui entoure cette formule pourrait produire d’heureuses surprises.
3) La technique du “strooplikker” : flagorneurs, lèche-bottes, fayots, cette méthode est pour vous. Vous ne satisfaites à aucune des conditions précédentes, mais désirez quand même devenir sujet du plat-royaume, faites donc comme Bernard Arnault et adressez une « demande de naturalisation » à la Chambre des représentants (l’Assemblée nationale belge). Une fois traités les 47.000 dossiers en attente, vous aurez peut-être une chance de voir votre demande acceptée.
4) Erreur de la “planque” en votre faveur : ça fait plus de 10 ans que l’administration vous prend – à tort – pour un Belge. Profitez-en, elle fera amende honorable et vous accordera de fait la nationalité.
La Russie et le tsar
Pour être naturalisé russe, il faut vivre depuis au moins 3 ans sur le territoire, être passé par l’étape du permis de résidence temporaire et / ou être marié à un(e) Russe. On peut aussi faire comme notre Gérard national et s’acoquiner avec le tsar. On aurait aimé pouvoir en dire davantage, mais fallait déchiffrer le cyrillique… Amis russophones, plus d’infos par ici.
Le Bhoutan, God bless the King
Marre de vivre dans un pays où le produit national brut (PNB) stagne depuis 4 ans, essayez donc le Bhoutan et son Bonheur National Brut (BNB) en pleine croissance. Sachez néanmoins que pour être naturalisé bhoutanais, il faudra être en très bons termes avec le Druk Gyalpo, sa sainteté le Roi Dragon, qui dirige cette théocratie himalayenne d’une main de clerc.
En effet, il est la seule personne à pouvoir octroyer la nationalité par décret. Commencez donc par apprendre à dire son nom sans bafouiller : Jigme Khesar Namgyel Wangchuck. Ca y est ? Pendant que vous y êtes, apprenez le Dzongkha, la langue nationale, et familiarisez-vous avec la culture et les normes sociales Ngalop – condition sine qua non pour obtenir la nationalité.
Ca re-y est ? Vous pouvez enfin dire Shoo lay log jay ge à la France (= bye bye).
Algérie, un pote aux services secrets ?
Vous êtes plus Batna qu’Evian, croissant que pain au chocolat, ski dans l’Atlas que ski alpin, faites donc le grand saut méditerranéen et partez vous installer en Algérie. Pour acquérir la nationalité algérienne, il faut :
– résider en Algérie depuis 7 ans au moins
– Etre majeur
– Etre de bonne moralité et n’avoir fait l’objet d’aucune condamnation infâmante.
– Pouvoir justifier de moyens d’existence suffisants.
– Etre sain de corps et d’esprit.
– Pouvoir justifier de son assimilation à la communauté algérienne »
Une dérogation peut être accordée aux étrangers qui ont rendu « des services exceptionnels » à l’Algérie (comme en France) ou « dont l’infirmité ou la maladie a été contractée au service ou dans l’intérêt de l’Algérie » ou encore quand une telle naturalisation présente un « intérêt exceptionnel » pour le pays. Dans tous les cas, il vaut mieux être proche du DRS pour obtenir ce genre de faveurs présidentielles (c’est le président qui accorde la naturalisation).
Bon à savoir : la nationalité algérienne est de celle qui colle à la peau. Si vous l’obtenez, pas question d’en demander une nouvelle après, sinon vous serez déchus de la première.
Ouganda, mieux vaut être réfugié
Ce petit pays des Grands lacs – comptant lui-même 80.000 lacs – a récemment décidé de régulariser et naturaliser massivement les réfugiés congolais et rwandais qui se sont installés sur son territoire entre 1960 et 1990. A vrai dire, ces réfugiés de longue date ne représentent qu’un petit pourcentage du nombre total de réfugiés (plus de 180 000), sans cesse nourri par les flux de réfugiés en provenance du Nord Kivu en RDC et de l’Etat de Jonglei au Soudan du Sud. A défaut d’entrer dans cette catégorie d’urgence humanitaire, il est possible de faire une demande d’acquisition de la double nationalité. Pour l’obtenir, il faut :
– s’assurer que son pays d’origine autorise la double nationalité
– ne pas faire l’objet d’un avis d’expulsion de la part des autorités ougandaises ou d’un autre pays
– ne pas être condamné par une cour de justice compétente à la peine de mort ou à une peine de prison de plus de 9 mois sans possibilité d’acquittement forfaitaire (amende)
– résider en Ouganda depuis au moins 10 ans
– maîtriser (« avoir une connaissance adéquate ») au moins une des 30 langues vernaculaires d’Ouganda – le Swahili et le Luganda étant les deux langues principales – ou, à défaut, savoir parler anglais, la langue officiel du pays.
– n’être ni diplomate, ni réfugié
– posséder des compétences rares et une aptitude au transfert de technologie
– faire serment d’allégeance au pays
– être sain d’esprit.
Notez néanmoins que cette naturalisation non-exclusive (vous gardez votre ancienne nationalité) interdit d’occuper les fonctions de Président, Vice Président, Premier ministre, ministre… et tout un tas de fonctions stratégiques pour le pays. Transfert de technologie, oui, mais sûrement pas de pouvoir. Le jeune médecin intérimaire du dernier Roi d’Ecosse en sait quelque chose…
Chine, rêve toujours
Si vous faites partie des 27 millions de personnes à vous être rendu en Chine en 2011, vous nourrissez peut-être le dessein de vous y installer et d’obtenir la citoyenneté chinoise. Si la première option est pour le moins envisageable, la seconde relève carrément de l’utopie. A moins bien sûr que vous ne soyez d’ores et déjà considéré comme un citoyen chinois, ce qui impliquerait que vous ayez au moins un parent chinois.
Pas facile, en revanche, pour un laowai, un étranger pur-sang, de devenir chinois. On a beau avoir le laowai style, il vaut mieux habiter depuis un bout de temps dans le pays et s’être fait de bonnes relations au sein du PCC (parti communiste chinois) pour espérer obtenir un jour le passeport chinois.
Certes, si on a des parents proches qui ont la nationalité chinoise, qu’on a des « raisons acceptables » de la demander à son tour, qu’on habite en Chine et qu’on accepte d’abandonner sa nationalité et de se plier corps et âme à la Constitution de la RPC, il est toujours possible d’espérer. Mais, sans ça, c’est proprement la croix et la bannière pour devenir chinois. Selon toute vraisemblance, seul 2 étrangers auraient réussi à devenir chinois depuis l’avènement de la RPC en 1949. L’un d’eux serait un transfuge américain, tombé aux mains de des communistes et passé de leur côté pendant la Guerre de Corée (1950-53).
En attendant une hypothétique 3ème guerre mondiale pour réitérer l’expérience, on peut toujours se rendre sur place pour nourrir le contingent d’ouvriers occidentaux en quête d’un nouvel El Dorado.
Argentine, la terre promise
Droit du sol et droit du sang se valent en Argentine. Que l’on soit né de parents argentins ou né en Argentine ou dans les Malouines (archipel britannique revendiqué par l’Argentine depuis 1982 et défini par cette dernière comme « une blessure au cœur de la nation argentine »), on est / naît de juris et de facto argentin.
En revanche en tant qu’étranger, plusieurs conditions doivent être remplies par les prétendants à la nationalité argentine. Théoriquement, il suffit d’être majeur (18 ans), d’avoir vécu au moins 2 ans en Argentine et d’avoir fait une demande d’acquisition de la citoyenneté devant un juge fédéral. Par ailleurs, il est préférable d’avoir un permis de travail en bonne et due forme, de ne pas avoir été en prison plus de 3 ans dans les 5 dernières années, et de n’être sous le coup d’aucune poursuite judiciaire pour des faits criminels.
Les lois argentines sur l’immigration n’ont pas changé depuis leur édiction en 1869. A cette époque, la priorité était au peuplement de ce territoire gigantesque et longiligne (en partie), d’où le profond libéralisme – laxisme, diront certains – des lois en la matière. Même si elle a été amendée à maintes reprises par la Cour Suprême, la loi garantit toujours la citoyenneté à des migrants qui n’ont pas de domicile fixe ou qui sont entrés illégalement dans le pays.
Reste qu’en pratique, les juges ont tendance à exiger des prétendants un certain nombre de documents qui tranchent avec l’esprit libéral des textes de loi : attestations de domicile et de travail, certificat de naissance visé par un notaire, casiers judiciaires argentins et du pays d’origine, preuve enfin de son aisance en espagnol. Allez, encore un petit effort et à vous les parillas, empanadas et le yerba mate.
Nauru, le trou perdu
A défaut d’avoir trouvé son bonheur ailleurs, il reste toujours ce caillou perdu au milieu de l’Océan Pacifique. Jusqu’à la fin des années 90, cette île de 21km2 avait tout de la terre promise : du phosphate à foison, un revenu moyen par habitant parmi les plus élevés du monde, des plages, une compagnie aérienne (Air Nauru) florissante… Mais depuis l’épuisement des réserves de phosphate, Nauru n’est plus que l’ombre d’elle-même, un vulgaire paradis fiscal et carcéral, qui a abrité jusqu’à 400 banques fantômes et des centaines de réfugiés transférés d’Australie. L’ex-Suisse du Pacifique a finalement atteint le triste record du plus haut taux de chômage au monde en 2009 : 90% d’inactifs. Mais bon, si vous avez gagné au Loto, il y a toujours la plage… Pour en profiter comme un vrai Nauruan, il faut :
– Etre une femme et se marier avec un Nauruan (messieurs, passez votre chemin)
– Etre né à Nauru et ne pas pouvoir obtenir une autre nationalité
– Etre promu citoyen par le Parlement (statut dont vous pouvez être déchu par le même Parlement)
France, la “Valls” des naturalisations
En matière de naturalisations, le ministre de l’Intérieur a beau vouloir « retrouver le rythme d’avant » le passage de Claude Guéant Place Beauvau, les conditions d’acquisition de la nationalité française demeurent relativement restrictives – relativement, c’est-à-dire moins restrictives qu’en Chine mais bien plus qu’en Argentine.
Pour être naturalisé français, il faut être majeur et résider en France depuis 5 ans – c’est-à-dire y être non seulement domicilié mais avoir encore « en France le centre de ses intérêts matériels (notamment professionnels) et de ses liens familiaux ». Ce délai de 5 ans peut être ramené à 2 ans si la personne a accompli avec succès 2 années d’études en vue de l’obtention d’un diplôme délivré par un établissement d’enseignement supérieur français, ou si elle a rendu des « services importants » à la France, ou encore si elle présente un parcours exceptionnel d’intégration civique, scientifique, culturelle ou sportive. Une dispense de durée minimum peut même être prononcée quand la personne a accompli plusieurs services militaires dans l’armée française ou rendu des « services exceptionnels » – cette fois – à la France (autre nom de l’espionnite aiguë), ou encore si elle obtient le statut de réfugié en France. Ajoutons qu’il faut être professionnellement inséré, assimilé à la communauté française (langue, culture : niveau d’un élève de troisième) et de bonne moralité (avoir de « bonnes vie et mœurs » : payer ses impôts et ne pas avoir été condamné pour terrorisme ou atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation). Manuel Valls a notamment assoupli les anciens critères de naturalisation en autorisant les personnes en CDD et en interim – et non plus seulement les titulaires d’un CDI – à postuler.
Etats-Unis, la carte verte
Avec la “Green Card”, le rêve américain est à la portée de tous. La Green Card, c’est le nom informel de la carte de résident permanent que 50.000 personnes acquièrent chaque année au terme d’une loterie géante – et géniale, car inédite dans le monde. Avec ce système entièrement fondé sur le hasard, n’importe qui peut devenir états-unien, pour peu qu’il ait misé sur le bon numéro.
Délivré par le USCIS, le précieux sésame n’accorde pas pour autant la citoyenneté aux personnes qui en sont détentrices. Il faut attendre 5 ans après l’obtention de la carte verte pour demander à être naturalisé. Par ailleurs, si comme tout citoyen américain, le titulaire d’une carte verte doit obéir aux lois et payer ses impôts, à la différence de ce dernier, il peut être expulsé du pays à tout moment et doit se munir de sa carte lors de voyages intérieurs.
Depuis un assouplissement opportun de la loi par Barack Obama en 2010, les personnes séropositives ne sont plus refoulées systématiquement des listes d’attente. De 1998 à 2010, il était en effet obligatoire de se faire dépister (VIH) par un médecin agréé de l’USCIS pour obtenir la carte verte, un résultat positif étant presque toujours synonyme d’inadmissibilité.
Reste à savoir si l’obtention de la Green Card permet d’accéder à son homonyme cannabique, l’autre Green Card, celle qui permet d’acheter du cannabis thérapeutique dans la plupart des Etats du pays ?
A ce petit jeu des homonymes, on se souviendra avec nostalgie de l’époque où, pour devenir “Ricain”, Gérard Depardieu s’appariait avec Andie McDowell, sa nouvelle compagne de fortune étant autrement moins… comment dire ?
Groland, le Groreich durera 10.000 ans
Si, finalement, ces nationalités ne vous siéent guère, il reste toujours l’inénarrable Présipauté du Groland. Pour devenir citoyen grolandais – « un sacerdoce et un combat de tous les jours » selon les autorités présipautales – et obtenir un bel autocollant à flanquer aux fesses de sa R5, il suffit d’envoyer une lettre mentionnant ses nom, prénom et adresse à :
Groland Magzine, CANAL+
1 Place du spectacle
92130 Issy les moulineaux
Banzai