Découvrez « Philosophie de la Mode » et « CyberPunk »
Un siècle de mode ?
Georg Simmel, philosophe et sociologue allemand, a sorti en 1911 un petit essai intitulé Philosophie de la mode ! Déjà ? oui déjà .
On redécouvre depuis peu ce penseur atypique et inclassable. Dans ce petit livre d’une cinquantaine de pages, G. S. décortique méthodiquement le pourquoi des phénomènes de mode, des obsessions, revirements, distinctions, obligations, répétitions et autres impératifs qui durent encore aujourd’hui !
Il a parfaitement compris et nous explique la complète inutilité de la mode, l’absence totale des raisons de ses virages. Et il a déjà analysé, il y a un siècle, tous les mécanismes des courants successifs. Phénomène de classes sociales, on voit donc passer les inventeurs, les avant-gardistes, les snobs, les prétentieux, mais aussi les suiveurs, les victimes, selon que l’on veut se distinguer des autres ou, au contraire, se fondre dans la masse.
Il y a peu de hasard dans les modes et nous sommes conditionnés comme des fourmis à nous débattre dans cet univers impitoyable du changement, de la consommation, des clans et de l’apparence. Bien sûr, dès le début du vingtième siècle, il y avait déjà des couturiers, des maisons, des stars et des journaux, des actualités, des égéries et des rédactrices de mode, du luxe et des tonnes de frime. Ainsi n’avons nous pas changé, et la technologie ou la mondialisation ont augmenté de nombre des adeptes, mais pas le fond.
Ce petit essai reste donc parfait, juste et sans bavure, mais il porte un petit coup au moral du lecteur qui se voit percé à jour et compris bien avant sa naissance …
Même du côté des primitifs – qu’il a l’intelligence d’appeler les peuples de nature – il constate que si les sociétés sans distinction de classe n’ont pas de mode (comme les bochimans et l’on pourrait aussi dire les pigmés), toutes les autres tribus sont férues de modes, d’accessoires, de distinctions et d’aristocraties diverses.
L’indicible, le virtuel et le non futur.
Autre essai de 60 pages et tout aussi pointu Cyberpunk, de Mark Downham : sauf que c’est l’inverse.
Si la mode est concrète, et définissable, le cyberpunk n’est qu’un fantasme, mais qui passionne certains. Car comment définir le cyberpunk ? Le futur dans le « No future », la technologie partout, jusque dans nos corps ?
Mouais… plutôt un genre stylistico-littéraire qui a effleuré la mode, les livres, les illustrations et la BD, le cinéma, et quelques objets. MD patauge courageusement dans cette soupe d’idées confuses, mais avec un look fort: robots, ordinateurs, clones, hologrammes, 3D…
Il connaît sur le bout de ses « data gloves » les grands ancêtres, les méga-auteurs de science-fiction : Norman Spinrad, Michael Moorcock, J.G.Ballard et évidemment Philip K. Dick, (Blade Runner est d’une de ses nouvelles, archétype du genre.)
L’auteur tente intelligemment d’y insérer les situationnistes et même le philosophe Baudrillard, et ne se gène pas pour balancer tout le jargon post-moderne : c’est que Mark Downham est un parfait british, snob, intello et branché. Mais des années 80.
Ainsi tout cela serait déjà vintage ? Exact, mais certains ne s’en lassent pas, leur cerveau a fondu dans le virtuel, leurs yeux clignotent avec les écrans, leur littérature vient d’un logiciel qui se répète à l’infini.
L’esthétique cyberpunk n’aura-t-elle été qu’une bulle miroitante qui a crevé aussi vite qu’elle était apparue ? Y a-t-il un avenir pour le bric à brac rouillé et décadent de la cybernétique neo-romantique ? Et si au contraire ces littérature et imagerie de crise des années 80 et 90 venait en fait des années 50-60 et 70, quand la SF a été en partie rejointe par la réalité technologique ?
Ca y’est, moi aussi je tourne en rond, je deviens retro moderniste et futur antérieur, c’est qu’il faut faire attention : le cyberpunk est contagieux et vous tamponne dans le cerveau un numéro de série comme un cyborg !
- Philosophie de la mode de Georg Simmel
- Cyberpunk de Mark Downham
Aux éditions Allia. 6 euros 20 pièce.