Le temps d’un week-end, oubliez ce pays où les flics forcent des infirmier.e.s grévistes à aller bosser. Oubliez ce pays où il y a 70% d’électeur.rice.s de droite, bien trop d’écrans pubs à la radio et où l’actualité donne envie, un jour sur deux, de se trancher la jugulaire avec un canif rouillé jusqu’au manche.
Bienvenue dans une enclave, une oasis. Une zone d’autonomie temporaire. Another green world. Oui, c’est le titre d’un des grands albums de Brian Eno, mais c’est aussi un bon slogan potentiel pour le Festival Vie Sauvage, ce havre tout beau tout vert qui ouvre ses portes pour la huitième fois, contre tempêtes et mascarets. Une bombance à la coule entre Garonne et Dordogne dont on prend toujours grand soin de cocher les dates dans nos agendas dès qu’elles sont annoncées.
Cette année encore, la programmation a de quoi choyer les cliquettes bien au-delà de la moyenne. Sans en faire un copier-coller in extenso (ce qui, même pour les féru.e.s d’inventaires à la Prévert, serait un brin redondant vu qu’elle figure déjà ci-dessus), on peut quand même souligner au gros feutre rouge quelques-uns des blases notables qui seront de la partie. Et notamment ceux des artistes qu’on a déjà vu passer sur les ondes du Grand Mix bordelais (qui sera diffusé dans les haut-parleurs, aux quatre coins de Bourg).
Tête d’affiche de cette édition 2019 comme de la scène pop tricolore, Flavien Berger distillera sans contretemps sa setlist dont on avait déjà dit tout le bien qu’on en pensait ici, lors de sa venue en novembre à Barbey. Un seul-en-scène avec ses machines, ses refrains à reprendre en choeur et ses échappées expé et ambiant, le tout encadrés d’automates drapés ressemblant comme deux gouttes d’eau au Sans-Visage du Voyage de Chihiro. Oui, ça fait un peu de monde, mine de rien – presque de quoi créer un parti. Votez Flavien.
On retrouvera aussi Clément Froissart, chanteur de Concorde lancé en solo dans des vignettes synthétiques très inspirées par l’adolescence, les premières fictions qu’on se construit et les premières frictions qui nous construisent. C’est électro, c’est mélo, c’est beau.
Et puis il y a la Londonienne Nilüfer Yanya, découverte sur Soundcloud et propulsée Miss Universe grâce à son premier album sorti en mars dernier. Une palanquée de chansons où cette Anglaise cosmopolite sort de sa réserve pour magnifier, avec sa voix soul à tomber de l’escabeau, ses fantasmes, ses échecs et toute la galerie des monstres qui se cachent sous les lattes. De la mélancolie, du stop-and-start à la guitare et des contours jazz, soul et indie-rock, dont elle nous avait offert un petit avant-goût dans une formule showcase qui fout déjà les poils.
Bref, sachant que rien que le passage de ces trois-là sur scène devrait suffire à en contenter plus d’un.e, je vous laisse imaginer le niveau tourneboulant d’allégresse béate qui sera atteint une fois ajouté.e.s au cadre, à l’ambiance et à la flopée d’autres artistes et DJs dans les parages.
Tout ça promet un week-end plutôt délicieux. Et ça, ce n’est jamais de refus. Surtout avant de devoir repartir dans – brrr… – la vie réelle.
Festival Vie Sauvage #8, du vendredi 14 au dimanche 16 juin @ Parc de la Citadelle (Bourg).