Dans Plus Près De Toi, Thomas Zribi, sur le futur Premier ministre hongrois.
Dans Plus Près De Toi, Thomas Zribi s’inquiète de l’élection au poste de Premier ministre, prévisible, de Viktor Orbán, et de l’ascension toujours plus forte de l’extrême droite en Hongrie.
Je voudrais parler des élections nationales hongroises qui vont avoir lieu dans dix jours, le 8 avril prochain.
Ce sont des élections qui font très peur, même s’il n’y a quasiment aucun suspense : le Premier ministre actuel, Viktor Orbán, sauf énorme surprise, sera largement réélu.
De la droite à l’extrême droite
Viktor Orbán c’est l’histoire d’un homme qui a commencé à droite, pour terminer à l’extrême droite.
Il a été Premier ministre une première fois entre 1998 et 2002. À l’époque il parle surtout d’économie : il veut baisser les impôts, les cotisations sociales, et l’inflation.
Il est battu en 2002, et revient au pouvoir 8 ans plus tard, en 2010. Pouvoir qu’il n’a pas quitté depuis.
C’est là que ça commence à se gâter. Depuis, sa politique n’a cessé de se radicaliser. Il commence par faire passer une loi sur le contrôle des médias : la télévision et la radio publique deviennent ses outils de propagande.
Il a par exemple une émission tous les vendredis à la radio, dans laquelle il donne sans contradicteur, son avis sur l’actualité.
Ensuite, il s’en prend à la justice. Il réduit le rôle de la Cour Constitutionnelle, l’équivalent de notre Conseil Constitutionnel, afin de faire passer toutes les lois qu’il désire, sans contre-pouvoir.
Et enfin il prend une multitude de décisions qui visent les Roms, il coupe les subventions des ONG qui leur viennent en aide, les juifs, il rend hommage à Milos Horthy, régent de la Hongrie pendant la guerre, et collaborateur avec les nazis, et surtout il s’en prend aux migrants musulmans.
C’est son sujet de prédilection. Il ne parle quasiment plus que de ça. Dans ses discours, quand il évoque les migrants, il parle de force d’invasion musulmane, il raconte que dans les 20 ans à venir, l’Europe va se retrouver peuplée de dizaines de millions de migrants venus d’Afrique et du Moyen Orient.
Il dénonce Bruxelles qui n’ose pas prendre des mesures fortes contre les étrangers, et affirme que l’identité chrétienne de l’Europe est menacée.
Bruxelles dénonce, Orbán s’en moque
Bruxelles, justement, a dénoncé les dérives d’Orbán. L’Union européenne a jugé illégale l’immense barrière construite à la frontière entre la Hongrie et la Serbie : Orbán s’en moque.
Elle a aussi dénoncé la prise en main des médias : Orbán s’en moque. Pareil pour l’enfermement systématique des demandeurs d’asile : Orban s’en moque.
Orbán se moque de tout, et apparemment, dans son pays, ça marche. Il est de plus en plus populaire. Les sondages le donnent largement vainqueur dans dix jours.
Quelle opposition en Hongrie ?
L’opposition hongroise, justement, est totalement explosée. Les partis de gauche n’attirent plus personne. Orbán a vampirisé la droite libérale.
Le premier parti d’opposition est le Jobbik, qui est encore pire qu’Orbán, puisqu’il a assumé pendant longtemps ses références néo nazies. Et même si, ces derniers mois, il tente de se rendre plus présentable, personne n’est dupe. Même le Front National le juge infréquentable.
Je résume donc la situation. Le premier ministre en place, qui mène une politique autoritaire et xénophobe va très probablement gagner les élections.
Et son principal concurrent est un parti aux références néo-nazies. Alors tout de même il y a un point qui est censé nous rassurer un peu.
Cette ville s’appelle (désolé pour la prononciation) Hódmezövásárhely. Il y a un mois, lors d’une élection municipale partielle, et à la surprise générale, le candidat du parti de Viktor Orbán, qui était largement favori, a été battu par son unique adversaire.
C’est donc un succès pour les opposants à Orbán.
Sauf que, quand on y regarde de plus près, on se rend compte que les trois principaux partis d’opposition se sont ligués pour battre le candidat du pouvoir.
Ces trois partis étaient le parti socialiste, le parti libéral, et le Jobbik, celui dont je vous parlais tout à l’heure, qui ne cache pas ses liens idéologiques avec le nazisme.
Cette victoire, écrit Libération, pourrait donner des idées à l’opposition qui pense à appliquer la même recette dans d’autres circonscriptions.
Je résume donc une dernière fois la situation : un Premier ministre ouvertement xénophobe, un premier parti d’opposition néo nazi, les socialistes et les libéraux qui pensent à s’allier avec le parti néo nazi pour battre le Premier ministre xénophobe. Et l’Europe qui malgré ses protestations, semble totalement impuissante.
Vous comprenez donc, je pense, pourquoi je vous disais tout à l’heure que ces élections faisaient peur.
Visuel : (c) Getty Images / Bloomberg