Aujourd’hui dans Vitamine So : l’hypnotisant « O Superman » de Laurie Anderson
Chaque matin juste avant Alpha Beta Nova , Sophie Marchand met en musique l’actualité d’ Un Nova Jour Se Lève avec un morceau faisant lien avec l’information du jour.
La droite cherche son super héros, est-ce que la musique l’a trouvé ?
Oui, elle a même trouvé sa super héroïne de la chanson expérimentale, de la poésie sonore. Et elle l’a trouvée en 1981, en la personne de Laurie Anderson. A l’époque Laurie Anderson a 34 ans, elle vit à New York et elle est artiste, critique, performeuse. C’est elle qui a été à l’avant-garde d’une certaine scène artistique underground et qui va signer le tube le plus surprenant de cette décennie : le bien nommé « oh Superman ».
Un morceau de 8 minutes 25 extrêmement surprenant, parce qu’il juxtapose des univers qui ne se croisent habituellement pas. Il commence par un soupir haletant, hypnotisant qui se fond dans un tempo à 150 BPM, et puis pendant toute sa durée, il évolue, se modifie grâce à un vocoder, intègre une voix de répondeur. Bref, ce « O Superman » est de la pure poésie postmoderne , presque mystique tellement elle attire, tellement elle est cryptique.
Par exemple, le public a mis un peu de temps à savoir de quel superhéros parlait le morceau. Et bien ce Superman, n’évoque pas directement le personnage de DC Comics, il en fait adapté d’une pièce de Jules Massenet. Un opéra variation sur le Cid où l’on entend à un moment (en français dans le texte) : “Ô souverain, ô juge, ô père”.
Ce triptyque va inspirer Laurie Anderson qui décide d’ouvrir son morceau avec une réinterprétation en anglais qui donne : “Oh Superman, O Judge. O Mom & Dad”, une phrase en quatre temps bien plus contemporaine.
On ne pouvait pas le deviner. Et c’est pour toutes ces raisons un peu occultes que ce « O Superman » aurait sans doute dû rester confidentiel. Et pourtant, lorsque le 45 tours est publié sur un minuscule label new yorkais, il trouve très vite un public, notamment grâce à l’animateur de radio John Peel qui va le diffuser régulièrement sur la BBC. En Angleterre, ce morceau grimpe tout en haut des charts aux côtés de Soft Cell, the Human League, alors qu’il est cent fois moins évident, et cent fois plus aventureux.
En France, Radio Nova va aussi beaucoup jouer ce morceau, dès 1981. Les fondateurs de notre radio : Andrew Orr, Jean François Bizot, vont s’en servir pour des illustrations sonores, pour des créations, des jingles, des performances. Parce que cet ovni musical ressemble à l’ovni radiophonique que Nova veut être dans les années 80.
Depuis ce morceau a été samplé, trituré, repris, réinterprété, et il n’a perdu aucun de ses pouvoir mystiques. Notamment celui d’amener quiconque l’écoute dans un espace temps un peu suspendu.