Éthique & éclectisme à Saint-Denis-de-Gastines.
Cette année encore la programmation du Foin De la Rue fait très envie : on y croise aussi bien notre chouchou Kate Tempest, que l’inarrêtable Wax Tailor, une très belle scène colombienne qui devrait faire beaucoup danser, mais aussi Puppetmastaz, Foreign Beggarz et plein de découvertes …
Ce qui frappe surtout quand on interview ceux qui font le festival, c’est la volonté d’ouvrir cette belle programmation à tous, l’envie que la fête soit très joyeuse. Bref, on a l’impression d’avoir affaire à un cocon bienveillant dans lequel chacun a la place de danser. Pour vous donner une idée de la chaleur humaine au Foin De La Rue, voilà un résumé de l’année 2016 :
Maxime Leduc, 37 ans, programmateur du festival
Comment est-ce que tu présentes le Foin De la Rue à ta grand-mère ?
Je lui dirais que c’est une petite république éphémère qui existe depuis 18 ans et qui sort tous les ans de terre juste pour 72h. Que c’est l’un des derniers espaces de liberté où tout le monde a sa place. Le vieux, les jeunes, les valides, les invalides … que c’est un territoire ouvert à tous, où chacun exprime sa sensibilité et que les bénévoles ont entre 16 et 80 ans. Comme quoi il a même de la place pour toi mamie.
Je lui dirai aussi que c’est un petit laboratoire de curiosités, et que sous la bannière de groupes à la renommée nationale ou internationale, il y a une scène émergente bouillonnante.
Justement dans la programmation de cette année, qu’est-ce que tu es très curieux de voir sur scène ?
Un des seuls groupes que je n’ai pas vus sur scène : Alibombo, un duo de percussionnistes colombiens qui font une sorte de techno en live. On pourrait dire que c’est de l’éco-techno, car ils font feu de tout bois : une roue de vélo, un zip de fermeture éclair, des tubes de PVC. C’est la demande technique la plus marrante que j’ai jamais eue : un bidon en plastique de 60L, un autre en métal de 200L, une roue de vélo…
D’ailleurs au festival ils auront aussi un atelier où ils expliqueront comment ils bricolent leur truc.
C’est vraiment une petite curiosité, un groupe ovni, que j’ai découvert grâce à un contact colombien en créant le plateau Colombie. Pour l’instant je n’ai vu que des vidéos, j’ai hâte de voir ce que ça donne.
Alibombo à découvrir en vrai au Foin De la Rue
Quelle image forte gardes-tu du festival ?
Je vais un peu me tirer une balle dans le pied parce que c’est une artiste avec qui ça ne s’est pas forcément bien passé mais Kenny Arkana, cette petite nana d’1m60 qui rappe et qui envoie en plein milieu du public sur un petit touret (les bobines géantes de câbles électriques), ça reste un grand souvenir.
Effectivement Kenny est bien sur un touret au milieu de la foule du Foin De la Rue (2013)
Qu’est-ce que tu as découvert en faisant la prog cette année ?
Le groupe anglais 67 que j’ai découvert tout simplement en surfant sur le net. Je les ai écouté il y a moins d’un an. Après les avoir booké, je me suis rendu compte qu’ils étaient programmés au festival de Birmingham, que Kate Tempest les a pris sur sa tournée.
Kate Tempest qui vient d’ailleurs cette année, qui est mon gros gros coup de coeur de l’année, qui m’a hypnotisé pendant une heure quand je l’ai vue sur scène et que j’avais vraiment eu envie d’avoir l’année dernière et qui n’avait pas pu.
67, soit l’indicatif téléphonique de Brixton Hill, au Sud de Londres.
Quelle rencontre est-ce que tu as pu faire grâce à ton job de programmateur au Foin De la Rue ?
La seule fois où je suis allé faire vraiment la groupie dans les loges, c’est quand Dj Shadow est venu en 2010. D’habitude j’ai beaucoup de respect pour les artistes mais ça va, je suis assez décomplexé, là j’étais vraiment tout penaud, je lui ai dit que c’était à cause de lui que je m’étais acheté des platines, qu’il m’avait fait découvrir le djing, j’étais vraiment comme un gosse. Finalement après 5 minutes où j’étais tout intimidé, j’ai passé une heure très sympa avec lui dans sa loge.
Je lui ai quand même fait signer mes disques.
Est-ce que tu as déjà eu une galère qui s’est bien terminée ?
En 2009, Karimouche : 10 minutes avant de monter sur scène, ils étaient encore coincés dans les bouchons à 10 km de Gastines. C’est les gendarmes qui les ont extrait des bouchons et des bénévoles qui connaissent toutes les routes par coeur qui les ont amenés jusqu’à nous. Ils ont fait 4 minutes de balances, et ils ont tout défoncé sur scène.
Valérie Vigouroux, 49 ans, présidente du festival
Comment en es-tu venue à devenir la présidente du festival ?
Je ne suis pas de la Mayenne à la base. J’etais juste de passage, et si je suis restée, c’est parce que j’ai trouvé incroyable la diversité de l’offre culturelle. Très rapidement je me suis mise en lien avec Le Foin De la Rue en tant que bénévole il y a 10 ans. Ce qui m’accrochait, c’était les rencontres et les découvertes, et puis je suis présidente depuis 2 ans. Mais le plaisir c’est aussi vraiment de prendre des responsabilités, d’impliquer vraiment les bénévoles, qu’ils soient acteurs du festival.
Quels concerts t’a mis une claque dernièrement ?
Flavia Coelho, une pêche, un partage avec le public, vraiment j’ai trouvé ça très beau. Sinon il y a tous ces groupes que je ne serais jamais allée voir si je n’étais au Foin De la Rue. Le fait de découvrir des choses que je n’aurais pas forcément écouté. Dans la programmation de cette année, Harleighblu, j’ai vraiment aimé ce que j’ai entendu.
Harleighblu – Enough Now
Quelle image forte te reste en tête ?
Dans le cadre de notre volonté de vraiment ouvrir la culture à tous, on travaille avec une structure géniale qui s’appelle Les Mains Baladeuses qui font des traductions de chants signés pour les personnes sourdes. On a eu donc des négociations avec des artistes qui ont accepté que leurs chansons soient signées. Je me rappelle par exemple d’un très beau moment avec Arthur H.
Oxmo Puccino traduit par Les Mains Baladeuses en Langue des signes ! pour le Foin De la Rue en 2016
Une autre image que je garde, c’est les personnages âgs de l’Ehpad qui sont venues en début de soirée danser avec des jeunes festivaliers qui étaient autour d’eux, qui ont pas du tout questionné de voir des vieux en chaises roulantes, un vrai partage spontané.
On travaille à l’Ehpad pendant l’année sur la scènographie, cette année il y a aussi des migrants qui vont nous aider au montage. En tout à l’année on travaille avec 36 structures, soit 320 personnes.
Merlin Loison, bénévole, 19 ans, membre de l’association au Foin de la rue
C’est quoi ton premier Foin de la rue ?
J’avais été entraîné par des amis ; et j’avais été super impressionné par l’ambiance qui y régnait, super-conviviale, l’entente incroyable entre toutes les générations présentes, c’était vraiment différent de ce que je connaissais.
C’est vrai que ça a l’air bonne ambiance
Quelles sont les claques musicales que tu as prises au Foin de la rue ?
Les Ogres de Barback, qui avaient invité un orchestre, ils étaient super-nombreux sur scène, c’était un vrai spectacle.
Little Big, un groupe russe bien enervé qui débordait d’énergie, le public était fou.
Et Deluxe il y a trois ans, ils venaient de décoller, j’avais été vraiment scotché, très impressionné. Ils reviennent cette année.
Live de Little Big filmé au Foin De La Rue
Quel groupe as-tu découvert grâce au Foin de la rue, que tu suis depuis ?
Faada Freddy, un groupe avec uniquement des chanteurs A Capella. On m’avait dit : va faire un tour quand même, tu verras, ça vaut le détour.
Effectivement, c’était envoûtant, je suis tout de suite rentré dans le concert et depuis je les écoute.
Faada Freddy en répétition
Quelle image forte gardes-tu du festival ?
Il y a deux ans, pendant un temps libre, j’étais allée à la scène Guinguette (il y a 4 scènes, la principale, une moyenne et deux plus petites : le chapiteau et la guinguette). Je me suis mis dos à la scène, etj’ai vu énormément de gens qui dansaient, qui grimpaient partout, aveec la décoration en plus, c’était plein de couleurs. C’était vraiment extrêmement chaleureux.
Pour le reste de la programmation du Foin De la Rue, c’est ici
Visuels : (c) DR