La face oubliée du « match du Siècle ».
Bien avant le combat entre Floyd Mayweather et Connor Mcgregor, entourés de montants d’argent astronomiques, il y a eu dans l’histoire un autre match de boxe au rayonnement colossal autour du monde. Ce match était appelé le « match du siècle » et il devait opposer Mohamed Ali à George Foreman dans une rencontre au sommet pour le titre de champion du monde poids lourds…Ce match devait être diffusé en Mondovision, intitulé Rumble In The Jungle, et était un évènement qui allait faire entrer à lui tout seul le sport dans une nouvelle dimension.
Celia Cruz, James Brown, BB King…
L‘évènement était tel qu’en marge du match était prévu des festivités diverses et notamment un festival de musique. L’ambition était d’organiser un évènement musical qui fasse date, emboiter le pas à des célébrations d’envergure comme au Sénégal en 1966 ou au Ghana en 1971. C’est ainsi que « Zaïre 74 », un immense festival, est pensé. Il devait faire se rencontrer les plus grands artistes de ce qui s’appelait encore le Zaïre (Actuelle RDC) mais aussi les têtes d’affiche venues du continent américain : Celia Cruz, The Crusaders, James Brown, BB King, Bill Withers ou encore Johnny Pacheco.
Le 25 septembre était la date fatidique du combat. Mais à quelques jours du combat, on apprend la blessure de Foreman, ce qui oblige le report de l’affrontement à cinq semaines plus tard.
Mais ce que l’histoire oublie, c’est que le festival a bien eu lieu, lui. Trois jours de concerts qui ne connurent pas la postérité méritée. Ironie du sort pour un évènement que Mobutu avait pensé afin de faire rayonner son nom à l’internationale, les concerts des artistes américains ont été parfaitement documentés, le concert de James Brown par exemple fait office de classique notamment grâce à la qualité d’enregistrement due aux gros moyens déployés par le producteur Stuart Lewine, secondé par le Sud-Africain Hugh Masekela pour l’organisation de l’évènement. En revanche, la dimension de la rencontre avec la diaspora africaine a été quelque peu été éclipsée. Dans le documentaire, When we were kings de Léon Gast, faisait seulement place à de très furtifs extraits musicaux des artistes africains. Le disque qui y était associé quant à lui ne diffusait que des extraits de quelques secondes.
Il y avait tout du moins des parts d’ombre sur les performances qui se sont déroulées lors de ce festival. Aujourd’hui, l’erreur est en partie réparée grâce à l’excellent travail mené par Wrasse Records, qui couche enfin sur disques certaines performances d’une grande qualité qu’une vision trop ethno-centrée avait omise. Pourtant ce sont des artistes d’envergure qui se sont produits : Tabu Ley, Abeti Masikini, Franco & l’OK Jazz, Manu Dibango, Miriam Makeba, les Stukas…
Et ce qui est formidable, c’est que la qualité des enregistrements s’applique aussi à ses concerts. En occultant les louanges chantées à Mobutu, il reste une matière discographique exceptionnelle et même un témoignage historique d’envergure, sur un des évènements les plus importants de l’histoire musicale du continent. Un disque qui vient donc corriger de tristes omissions de l’histoire.
Visuel : (c) Wrasse Records