Pépouze dans son chalet des Alpes, cet énigmatique « ermite » nous chante « depuis l’année 2081 » les louanges d’une mesure très attendue : le revenu universel de base.
Cet enregistrement nous est parvenu par la grâce liquide d’une bouteille de génépi, déposée en évidence à l’entrée des studios, fin août. L’étiquette indiquait : « Pour votre Arche. » À travers le verre, un petit coffre en plastique flottait dans l’alcool de plantes. Le soir même, il fallut trois heures à notre équipe pour boire avec bravoure la boutanche entière, qui tomba en même temps que l’un de nos animateurs, et se brisa. Le coffre roula, s’ouvrit, révélant une pochette étanche, abritant elle-même une clé USB, contenant enfin plusieurs messages audios d’un certain « Carl Agité ».
Après débat au sein de la rédaction, il a été décidé de partager avec nos auditeurs ces « témoignages du futur », situés « en 2081 », cent ans exactement après la création de Radio Nova. L’auteur s’y présente sous les traits d’un ermite, « vieux sage et vieux singe », habitant un modeste chalet au pied du mont Blanc. Surprise, agréable : à « son » époque, le monde ne s’est pas encore écroulé. Et tout ceci serait dû à la mise en place d’une mesure très attendue : le revenu universel de base.
Cependant, dit-il, à la différence de celui qui sera bientôt expérimenté en Allemagne (sélectionnées parmi un million de volontaires, 120 personnes toucheront 1200 euros par mois pendant trois ans, sans condition, sans obligation de travail, afin d’étudier leurs comportements), « trois journées de boulot » seront exigées de l’Etat « en fonction de nos compétences et de notre forme physique, pour des activités collectives qui profitent à tous, par tirage au sort », d’après Carl Agité. Réparer une route, bêcher un verger, nettoyer une rivière, enseigner le français à des réfugiés, réfléchir à une loi anti-corruption ou « s’occuper de la popote à la cantine »… les activités tournent et les chefs aussi. Et le reste de la semaine ? On se gratte le dos, à la coule.
Image : The Big Lebowski, de Joel Ethan Coen (1998).